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  • : Ecritures à la loupe
  • : Présenter des écritures manuscrites d'écrivains célèbres avec une étude graphologique, des comptines pour enfants, l'un de mes romans et beaucoup de mes coups de coeur, voilà l'objectif de ce blog. J'espère que vous vous y sentirez également chez vous...
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Mes romans

histoire

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25 septembre 2006 1 25 /09 /septembre /2006 22:00








Il faut sans doute avoir écouté Le Masque et la Plume sur France-Inter dans les années 70 pour savoir vraiment ce qu’est la passion du cinéma. Les joutes critiques entre Bory et Charensol, leurs arguments balancés et criés comme des actes de foi, leur fougue, leur enthousiasme et leur intime conviction nous faisaient spectateurs, en différé et par procuration, de tous les films qu’ils avaient vus, passionnément vus, aimés ou détestés, admirés ou méprisés. Des deux, Bory était souvent le plus libertaire, le plus « marqué à gauche » comme on disait alors, mais pas toujours. Là, comme ailleurs, dans ses chroniques à l’Express ou sa rubrique au Nouvel Observateur, il se préservait de toutes les étiquettes, de toutes les influences, n’étant attentif qu’à une chose : dire sa propre vérité.

 


Il pouvait parfois la dire très fort, quitte à choquer, ou provoquer, ou prendre des risques personnels. En 1960, alors qu’il était jeune professeur de lettres à Henri IV, il a signé le fameux « Appel des 121 »,  la pétition réclamant le droit à l’insoumission pour les soldats partant pour l’Algérie. Certes la sanction de l’Education Nationale n’a pas été trop rude puisqu’il ne fut suspendu qu’un mois, mais il courut le risque de se voir empêché de faire ce métier qu’il aimait passionnément, et qu’il exerçait avec autant de générosité que de charisme, un peu à la manière du professeur du Cercle des poètes disparus.

 


Il est une autre bataille, plus personnelle sans doute, dans laquelle il s’est engagé longtemps, et en première ligne, c’est celle qu’il a menée pour la tolérance de l’homosexualité. Il faut se souvenir de ce qu’était la France de 1970 et de ses tabous en la matière, que même 68 n’avait pas pu entamer, pour mesurer l’impact de cette simple phrase « Oui, je suis homosexuel ». Dans cette bataille, Jean-Louis Bory s’est beaucoup exposé, et même sur-exposé, parlant partout, et jusque sur les plateaux de la défunte ORTF en prime-time. De cette surexposition, d’ailleurs, il a fini par prendre conscience, se sentant devenu le « gugusse de l’homosexualité militante ».

 


Cet homme de médias, cet intellectuel engagé, porte-étendard de sa cause, véritable exemple-type de cette époque des années 70, était aussi bien autre chose. Né dans un village de la Beauce au lendemain de la Grande Guerre,  il demeurera si attaché à ses racines qu’il y aura, toute sa vie sa résidence principale, la « Calife », l’ancienne maison de ses grands-parents. Fils d’un pharmacien et d’une institutrice, petit-fils d’instituteur, il s’inscrira toujours dans cette lignée, où on respecte et honore la culture et le savoir. Agrégé de lettres, amoureux des beaux textes romanesques du XIX°, il fera entrer Balzac dans tous les foyers, en adaptant certaines de ses œuvres pour la télévision, et d’autres d’Eugène Sue ou George Sand.

 


Il fut, lui aussi, un écrivain, mais son parcours, sans doute, ne se fit pas dans le sens, normal, de la progression : C’est pour son 1° roman, en effet, Mon village à l’heure allemande, qu’il décroche à 26 ans la récompense suprême, le Goncourt. La suite sera forcément moins brillante : Ma moitié d’orange sera un succès public, mais le devra probablement au fait qu’il y « révèle » son homosexualité. De tous les autres, une trentaine, peu se souviennent.

 


Dans la nuit du 11 au 12 juin 1979, dans sa maison de Méréville, après avoir pris soin de brûler ses archives et ses papiers personnels, après avoir testé vers le plafond le bon fonctionnement de son pistolet, Jean-Louis Bory s’est tiré une balle dans le cœur.


Ce court autographe, écrit peu de temps avant sa disparition, confirme le pouvoir de conviction aiguisé par le besoin d’entraîner dans son sillage, de créer tant sur le plan intellectuel qu’affectif un lien indéfectible au travers de son écriture grande, liée à hyper liée, inclinée systématiquement, anguleuse, tendue et étalée.

Il illustre également la capacité à s’ouvrir aux sens, aux sentiments et aux idées, à s’en imprégner  dans ses inégalités, son trait large, léger et pâteux, ses oves crénelés et pincés.

Il montre  enfin chez celui dont la devise était « tout feu, tout flamme » la quête d’une liberté érigée en dogme, d’une farouche indépendance et le désir d’expression personnelle en première ligne dans la liberté de la mise en page, l’emphase du « J », les combinaisons et l’aisance du geste.











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commentaires

F
Bonjour. J'étais très proche de Jean-Louis aussi, merci de rectifier la date de son suicide. Il s'est suicidé durant la nuit du 11 au 12 JUIN. Pas du tout à la date que vous dites. Merci pour le souvenir que nous gardons de lui.
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A
<br /> <br /> Merci d'avoir rectifié cette erreur incompréhensible puisque j'avais lu avec attention la biographie de Daniel Garcia sur J-L Bory. Faute impardonnable de<br /> ma part... toutes mes excuses.<br /> <br /> <br /> <br />
M
Hélas j'étais trop jeune pour la connaître mais j'ai lu quelques uns de ces livres comme "Ma moitié d'orange" ou "Le pied". J'aurais aimé le connaître de son vivant, c'est certain.Quant au "Masque et la plume", on loupe rarement une émission le dimanche (rediffusée toute la semaine sur le site), une des rares émissions avec la regrettée "Rien à Cirer" puis Le fou du roi que l'on écoute depuis des lustres. Bien que le niveau ait quand même baissé.Bises, je te laisse préparer tes valises. :0010: 
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P
Oui Catherine , je m'attendais bien à ce que tu réagisses à mon commentaire ... Je conçois la tolérance comme une valeur morale  mais bien souvent les gens pensent qu'au delà d'accepter la différence , on légitime ce qui est hors norme comme l'homosexualité par exemple  ... Je ne veux  pas de mal aux homosexuels , ils ont leur problématique et celle-ci ne peut se dissocier, sinon d'un mal être, mais aussi d'une situation pathologique profonde ... Par ailleurs, je suis d'accord que ces personnes, de plus en plus nombreuses puissent bénéficier des mêmes droits que leurs contemporains mais en relativisant par raport aux droits parentaux ... un enfant qui a deux papas ou deux mamans, c'est uen expérience éducative et familiale qui a ses conséquences... On ne doit pas pratiquer la politique de l'autruche mais voire ces choses bien en face ... sans celà , à l'avenir on acceptera des situations  de plus en plus déshumanisantes ...Tolérance et  légitimation,  Voilà un thème à développer dans un article  ... j'y pense ...Gros bisous Catherine
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P
Un esprit  éclairé sans concession provocateur en son temps ...  C'est aussi toute une époque où l'on remet en cause un certain ordre sociale , les principes, les convenances... parfois ça allait loin et dans certains esprits ça semait la confusion ... Epoque oùl'on m'élangeait les genres  les valeurs ...Personnelement, je n'ai pas toujours partagé ces points de vue diamétralement opposés à une éthique  plus en phase avec  un juste équilibre dans la relation avec les autres et les bonnes moeurs ...Gros bisous à toi Catherine des Farfadets  
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A
Jl Bory a toujours tenu un discours éclairé et modérateur et c'est bien malgré lui qu'il est devenu le porte parole des homosexuels à l'époque. Ses valeurs étaient très humanistes et pétries de tolérance... donc je le trouve très "actuel" lol
C
Eh oui !!! Tu l'as deviné à mon écriture ??? ;-)
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C
En promenade aussi ...
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A
Kikou Cajou..... une autre Catherine... si je ne me trompe... ;)))))))
G
Je me suis promené sur ton  " Site Graphologique " , c'est passionnant .<br /> J'ai apris plein de choses et ai vraiment découvert ce qu'est LA GRAPHOLOGIE . <br /> J'ai un peu de mal avec ma fille ces derniers temps , et je vais faire appel à tes services via ton Site Grapho , pour essayer de mieux la comprendre .
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A
Un personnage pour lequel je n'avais guère de sympathie, sans doute parce que je n'en connaissais que les coups de gueule à la radio, et les propos par trop anti-conformistes. Mais tu m'en donnes ici une image différente, plus nuancée, et je relirai avec plaisir quelques chapitres de ce monsieur qui ne se préoccupait pas de sa renommée. Merci à toi pour cette analyse. André.
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M
Un personnage que je n'aime pas du tout mais une très bonne analyse à mon avis.
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C
Une question toute bête...<br /> Notre façon d'écrire change suivant le type de lettre que l'on rédige (ex : une réclamation ou une lettre de motivation). L'analyse graphologique peut-elle alors avoir un "jugement " objectif sur notre comportement?
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