Blog-notes*
IV
Je m'y étais prise à l'avance. J'avais même préparé la veille grâce à Mappy, l'itinéraire le plus pratique pour rejoindre la Seine et Oise depuis mon domicile et fait le plein d'essence sans plomb 95.
J'avais résisté à l'envie de m'arrêter à mon café favori pour prendre un petit noir serré au comptoir et griller une clope.
J'avais flirté en permanence avec les cinq kilomètres heure au-dessus des limitations de vitesse sans me faire flasher.
J'avais réussi à me garer à deux pas du commissariat sur un emplacement qui venait miraculeusement de se libérer et pourtant... J'avais un quart d'heure de retard, j'avais oublié ma loupe dans mon bureau et j'avais curieusement très faim.
Magnanime et efficace, Guedj se mit en chasse et finit par ramener à la surface de je ne sais quel bureau une loupe au manche de bois poli et déverni par de nombreuses manipulations. Il m'avait remis la lettre de Morgan et prêté son bureau pour que je puisse y travailler dans de bonnes conditions. La triste réalité était que le volume sonore dépassait l'entendement au sens littéral du terme. Comment pouvait-on bosser dans un tel vacarme ? Pensai-je, en me promettant d'ajouter à la liste de mes achats futurs des boules Kiès.
Je ne m'attendais pas à grand chose de particulier en entreprenant mon observation, l'expérience m'ayant appris à garder de la distance par rapport aux écritures et à me laisser interpeller par elles sans l'ombre d'un a priori. Mais là, j'eus quand même un choc.

La maladresse, la surabondance de signes enfantins donnaient à cette écriture le faciès d'un écrit d'une gamine de CM2 et encore d'une gamine de CM2 à problèmes...
Dans le dossier fourni par les parents et complété par quelques documents scolaires confiés par la tante, je pris quelques cartes postales écrites par Morgan pendant ses vacances un an plus tôt et des cahiers de classes assez récents. Mon travail de comparaison pouvait commencer.
S'il était graphologiquement facile de comprendre pourquoi les parents de Morgan s'étaient refusés à reconnaître dans cette lettre l'écriture de leur fille, je mis beaucoup de temps à démontrer preuves à l'appui que cette écriture était pourtant bien la sienne. Ils avaient le droit de comprendre dans les détails les plus infimes que le doute n'existait pas. Je venais de rédiger ma conclusion, lorsque Guedj entra dans son bureau.
*BLOG-NOTES est un manuscrit déposé, ayant reçu un numéro d'ISBN mais non encore corrigé et édité. Les amis bloggeurs qui auront le courage et la ténacité de lire ce petit suspense jusqu'au bout seront nommément cités sur le livre en dédicace.