René Barjavel
René Barjavel est né à Nyons en 1911. Son père Henri, boulanger dans cette ville, se retrouve mobilisé au début de la guerre. Sa mère, Marie Paget, le
remplaçe dans la boulangerie, et n'a que peu de temps à consacrer à l'enfant. Le jeune René, jouissant d'une liberté de circonstances découvre la nature et s'émerveille de ses
prodiges. Il se plonge dans la littérature, grandit dans l’amour d’une mère happée par le travail, et l’affection de sa cousine, Nini. Son père revenu, il travaille à la boulangerie tout en
poursuivant ses études.
À l’école, il se montre médiocre écolier, sauf en français et son professeur Abel Boisselier, remarque vite ses qualités dans cette matière et l’exhorte à continuer ses études. Son
père ne pouvant les lui assurer, le professeur en fait son protégé et le recueille.
Marié en 1936, père de Renée (Nanou) et de Jean dans les deux années qui suivent, il est à son tour mobilisé en septembre 1939 comme caporal d'intendance dans un régiment de
zouaves. Révolté par l’esclavage du soldat et la bêtise militaire, il développe un net penchant antimilitariste. De retour parmi les siens dans Paris qu’il ne quittera plus, il publie son
premier roman, Ravage. Il vit, seul, la libération de la capitale où s'affrontent les Allemands en fuite, les jeunes idéalistes du maquis et les voisins devenus justiciers. Il n'échappe
pas à la vague de suspicion qui agite les pensées de l'époque, mais ses amis écrivains le blanchissent des accusations de collaboration portées contre lui. Robert Denoël n'a pas cette chance, et
lorsque le comité d'épuration le démet de ses fonctions, Barjavel dirige de fait la maison d'édition jusqu’à l'assassinat de l'éditeur le 2 décembre 1945.
Après la guerre, il mêle les activités de journaliste à Carrefour, de critique, de romancier et de scénariste. Le manque d’argent et l’échec en 1948
de Le Diable l’emporte marquent le début d'une rupture avec sa carrière de romancier; il s’aventure alors dans le cinéma. La tuberculose et ses lacunes financières l’empêchent de
réaliser son projet de film Barrabas. Adaptateur, dialoguiste, le cinéma ne gardera pas de son passage dans le septième art un souvenir marquant, malgré son empreinte profonde
dans de nombreux films, dont les Don Camillo, Les Misérables (de Jean-Paul Le Chanois), Les chiffonniers d’Emmaüs, Le Mouton à cinq pattes, Le
Guépard, etc.
En 1962, il participe à l'essor de la science-fiction française en publiant des nouvelles dans la revue Fiction. En 1963 avec Colomb de la lune, en 1968 avec La faim du tigre,
puis en 1969 avec La nuit des temps qui obtient le prix des libraires, Barjavel renoue avec la littérature et remporte un franc succès populaire. En 1972, il participe à
la création du Prix de science-fiction Apollo. En 1973, d'un projet de film non réalisé avec André Cayatte, il tire un roman Le
grand secret.
A partir de cette époque il continuera à écrire des pièces de théâtre, collaborera avec son ami Olenka de Veer pour l'écriture de romans, prendra des positions écologistes
dès 1977 face à la montée de l'énergie nucléaire, publiera des photos de nature ainsi qu'un autobiographie romancée La charette bleue en collaboration avec son demi-frère Paul
Achard.
En 1980, alors âgé de 70 ans, il met un terme aux chroniques qu'il tenait au Journal du Dimanche et se consacre entièrement au roman avec Une rose au paradis (1981), La tempête
(1982) L'enchanteur (1984) et La peau de César (1985) un polar.
Une crise cardiaque le foudroie à Paris le 24 novembre 1985.
Il reste dans l'esprit du public un écrivain français précurseur dans le domaine de la SF, mais sa production littéraire montre aussi et surtout un homme amoureux de la nature qu'il dépeint avec
tendresse et une palette de mots colorés, un "fabuliste" comme il aimait lui-même se définir, un amoureux des femmes et de l'amour avec des termes et des métaphores pleins de sensualité, un
dialoguiste de talent pour le cinéma, un "fataliste" empreint d'une vision sans concessions de la nature humaine et fasciné toute sa vie par l'avenir de l'homme.
Au terme d'une vie faite de questionnements sur le futur de l'humanité, ses derniers écrits renouent avec l'émerveillement de l'enfance, et adoptent une position optimiste,
tolérante, pleine de compassion.
Son écriture:
Une écriture au feutre bleu, au trait large, nourri et à l'appui différencié avec des finales massuées, grande et plutôt régulière, mélangeant l'arcade et la guirlande, la courbe et l'angle, liée avec quelques arrêts dans la continuité, à la conduite ferme à tendue...
Ecriture qui affiche son tonus, sa vitalité. Le goût de la vie, des contacts humains s'y exprime sans parcimonie et sur un fond de confiance en soi évident. Le pathos domine le graphisme et traduit une foi qui éveille les espoirs, inspire l'ardeur, l'idéalisme, l'ampleur de vues et de projets. Les facultés sensitives et l'affectivité engrangent les images et les impressions, nourissent l'imaginaire et la créativité.
La générosité, la capacité à donner de soi ne sont cependant pas exempts d'un besoin de reconnaissance et du désir d'être à son tour apprécié, reconnu, aimé. La spontanéité du geste mais aussi son contrôle traduisent une discipline personnelle pour mieux assurer une surveillance entière sur les émotions et la sensibilité.
Caractère entier, certes, souci de l'opinion d'autrui sans doute, mais un tempérament prêt en tout à assumer ses choix, à partager pour le plaisir, à offrir aux autres le meilleur de lui-même.
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